Gombert-story

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Le Noël

" De toutes les fêtes religieuses célébrées en Provence, la Noël est certainement la plus importante, la plus populaire, la plus généralement observée par les riches comme par les pauvres.

Elle se divise en quatre parties : la Crèche, les Calenos, la Messe de minuit et le Jour de Noël.

La crèche a la même origine que les mystères ; ce sont les Pères de l’Oratoire qui, les premiers à Marseille, en donnèrent le spectacle.

De nos jours, la semaine qui précède la Noël, il s’établit sur le Cours une foire où l'on vend des crèches toutes préparées. On y trouve également les Santons el les accessoires pour ceux qui veulent les composer eux-mêmes. Ces santons représentent saint Joseph, la sainte Vierge, le petit Jésus, le bœuf, l’âne, les rois maures et, en général, tous les personnages et les animaux qui se trouvaient à Bethléem  à la naissance du Christ.

Ce soir, les familles s’assemblent et, à la lueur des cierges, chantent les noëls de Saboly.

Les Calénos, altération du mot " Calendes ", consistent en cadeaux que l’on échange à cette époque. Ce sont des fruits, des poissons et surtout un certain gâteau au sucre et à l’huile que l’on appelle Poumpo taillado. Les boulangers et les confiseurs ont conservé l’usage d’en envoyer à leurs clients.

La veille de la Noël, au soir, les familles se réunissent dans un banquet, et rivalisent d’efforts pour lui donner plus d’éclat. On voit même de pauvres gens qui n’hésitent pas à porter un gage au mont-de-piété, afin d’en pouvoir faire les frais.

A Marseille, il est désigné sous le nom de Gros souper; mais, pour retrouver vraiment les anciens usages, il faut aller dans les communes rurales. Là, le père de famille conduit par la main le plus jeune des enfants jusqu’à la porte de la maison où se trouve une grosse bûche d’olivier, tout enrubannée, qu’on appelle Calignaou ou bûche de caléno. L’enfant, muni d’un verre de vin, fait trois libations sur la bûche en prononçant les paroles suivantes :

" Alégre, Diou nous alègre. Cachofué ven, tout ben ven. Diou nous fagué la graci de veire l'an qué ven. Se sian pas mai, siguen pas men." (Cf. vidéo en suivant)

Ce qui se traduit ainsi :

" Soyons joyeux. Dieu nous rende joyeux. Feu caché vient, tout bien vient. Dieu nous fasse la grâce de voir l’an qui vient ; si nous ne sommes pas plus, ne soyons pas moins."

Dans le verre, qui passe à la ronde, chacun boit une gorgée.

L’enfant soulève le calignaou par un bout, l’homme par l’autre et ils le portent jusqu'au foyer en répétant devant les assistants les paroles de la libation. Puis on l’allume avec des sarments et ou le laisse brûler jusqu’au coucher, moment où on l’éteint, pour le rallumer le lendemain, en ayant soin qu’il se consume entièrement avant le jour de l'an.

On célèbre par cette cérémonie le renouvellement de l'année au solstice d’hiver. La flamme que la bûche recèle dans ses flancs représente les premiers feux du soleil qui remonte sur l'horizon. L’enfant est le symbole de l’année qui commence, le vieillard de celle qui va finir.

Là où l'usage du Calignaou a disparu, il a été remplacé par la lampe de Caléno ou Calen (*). C’est un carré de fer-blanc avec un rebord, dont les quatre angles en forme de bec contiennent des mèches. On le suspend par un crochet fixé à une tige en fer et il sert à éclairer la crèche sur le devant de laquelle pousse, dans deux soucoupes, le blé de Sainte-Barbe. Il doit brûler huit jours et ne s’éleindre que la veille du jour de l’An.

Le souper, dans ces pays primitifs,comprend trois services ; pour y correspondre, la table est couverte de trois nappes de dimensions différentes.

Le premier service se compose de la Raïto, plat de poissons frits auquel on ajoute une sauce au vin et aux câpres, et qui, d’après la tradition, fut apporté de la Grèce par les Phocéens.

Des artichauts crus, des cardes, du céleri et différents légumes lui servent d’accessoires. On enlève ensuite la première nappe et l’on sert les Calénos qui consistent en gâteaux, Poumpo taillado ou autres, des fruits secs ou confits, des biscuits, des sucreries, des marrons, etc. On les arrose de vins vieux du pays et d’une espèce de ratafia appelé Saouvo- Chrestian (sauve-chrétien) fait avec de la vieille eau-de-vie dans laquelle ont infusé des grains de raisins. Pour le troisième service, on prend le café et les hommes fument une sorte de pipe appelée Cachinbaù.

La gaieté préside à ces agapes; on y chante des noëls et l’on ne se sépare que pour aller à la messe de minuit.

La Messe de Minuit.

Elle diffère par certains détails originaux de celle qui est célébrée dans les villes. C’est ainsi qu’au moment de l'offrande ou voit s'avancer de l'autel le corps des bergers précédés du tambourin, de la cornemuse et de tous les instruments rustiques que l'on peut se procurer, Ils portent de grandes corbeilles remplies de fleurs et d'oiseaux.

La Noël est essentiellement dans toutes les classes de la société une fête de famille. On se réunit à table le soir en face d’un excellent repas dont la dinde fait le fond. Puis l’on se groupe autour du foyer, où le chef de famille raconte les vertus des ancêtres, et répète devant les enfants les traits capables de leur servir d’exemple ou d'enseignement ; ce jour-là, il revêt ainsi que sa femme ses habits de mariage conservés tout exprès.

Dans le peuple, le troisième jour de la fête, le dîner se termine par an plat d'aïoli ou de Bourrido, mets traditionnels en Provence. En se retirant, on se donne rendez-vous pour l'année suivante."

Source : Google - La Provence : usages, coutumes, idiomes - Henri Oddo - 1902.

(*) Calen ; appelé à tort "calin" dans le langage courant.

Le Réveillon.

REVEYOUN. Petit repas extraordinaire qui se fait entre le souper et le coucher.

Source . Dic. Provençal / Français - JT Avril - 1839

Source : Google - La Gloire de mon Père - Film d'Yves Robert - 1990 - extrait

CACHO-FUECH

On appelait ainsi la grosse bûche que le chef de la maison allumait avec cérémonie la veille de la Noël, en prononçant ces paroles qui nous ont été conservées par écrit, mais que deux ou trois générations au moins n’ont pas entendues :

Alegre! Diou nous alegre!

Cacho-fuech (*) vent,

Tout ben vent ;

Diou nous fague la graci de veire l’an que ven,

Se siam pas mai que sieguem pas mens.

Joie! Dieu nous réjouisse !

Cacho-fuech vient,

Tout bien vient ;

Dieu nous fasse la grâce de voir l’an qui vient (l’année qui s’approche).

Si nous ne sommes pas plus nombreux, que nous ne soyons pas moins.

(*) A NOTER : Version d'origine en fin de rubrique...

On se souviendra longtemps des innombrables cacho-fuechs qui ont égayé les habitants restés en ville pendant la contagion cholérique qui a désolé notre ville en 1865. Ces feux furent tellement nombreux et intenses, que les pavés calcinés partout sont, dit-on, l’occasion d’une dépense pour la caisse municipale d’une somme de 60,000 francs. Le choléra ayant malheureusement repris en 1866, on a fait encore quelques feux, mais moins nombreux que l’année précédente.

Source : Google - Les cris des Marseillais - R de la Colombière - 1868

Aqueou grand rei de glori.

Es nat à miege nuech

N'en fasen la memori

Quand meten cacha-fuech.

Gautier.

L’usage de cette bûche est général en France el se pratique depuis les temps les plus reculés ; mais il y a quelques variantes dans certaines localités.

En Provence, par exemple, où l’on nomme cette bûche calignaou, dans les campagnes, le doyen de la famille conduit à la porte de la maison, la veille de Noël, le plus jeune enfant, et celui-ci, faisant trois libations avec du vin, sur une grosse bûche d’olivier ou d’arbre fruitier qu’on a déposée devant cette porte, prononce en même temps les paroles qui suivent :

Aleyre, Dieu nous aleyre

Cachofué ven, tout ben ven ;

Diou nous fague la gracl de veire l'an que ven.

Se sian pas mai, que siguen pas men.

Ce qui signifie : " Soyons joyeux, Dieu nous rend joyeux. Le feu caché vient, tout bien vient ; Dieu nous fasse la grâce de voir l’an qui vient ; si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins. "

On pait alors passer à la ronde le verre avec lequel l’enfant a accompli les libations; puis cet enfant saisit la bûche d'un bout, tandis que le vieillard la soutient de l’autre, et ils la placent sur le foyer ; mais on l'éteint à la fin de la veillée pour la conserver jusqu’à l’année suivante.

On attribue au calignaou la vertu de ne point brûler le linge; et il était même d’babitude autrefois, à Marseille, d’en placer sur la nappe du festin, trois charbons ardents..

Origine : Archive.org - Encyclopédie Théologique - TXX - Dic. des superstitions, erreurs, préjugés...- Abbé Migne - 1856

LA BÛCHE DE NÒ

La Bûche de Nò. C'est la Bûche de Noël des origines.

Le soir de Noël, les voisins s'entre-aidaient pour porter la bûche qui sera mise dans le foyer pour la veillée. Lors de la mise dans l'âtre, la famille criait "Calen ven, tout ben ven !, Calen ven, tout ben ven !"

Dès que les cris ont cessé, le Père de famille, et en son absence, le plus agé de la famille s'avance vers la bûche ; pour la bénir, verse du vin dessus en invoquant la Sainte Trinité en disant : "Au nom du Père, et du Fils et du Saint Esprit". Il y mettait alors le feu.

Source : Gallica - Explication des usages & coutumes des Marseillais - T1 - F Marchetti - 1683 - XVII

LA TABLE, LES NAPPES, LES PAINS, LES RESTES...

Dialogues de Polyhore & Philopatris - 1683

" Il est mis trois nappes l'une sur l'autre. Elles sont une marque de respect. Deux étaient mises sur la table du Roi ; la troisième en référence à la Trinité.

Le soir de Noël, treize pains étaient mis sur les nappes. L'un d'eux appellé "Pain de Notre Seigneur" était le plus gros (*). Les autres représentent les apôtres. Le pain qui représente Notre Seigneur, est coupé en trois parts, pour représenter Sa Personne et ses deux Natures : la Divine et l'Humaine. Le pain est alors distribué aux pauvres.

Des branches de myrthes sont mises dans les grands pains confectionnés pour l'occasion par les boulangers. Elles représentent la croix sur laquelle, le Divin Enfant sera un jour attaché. Ces pains se conservent pendant une année entière.

A la fin du repas, les restes de pain, amandes et noix, sont conservés par tout le Peuple. Ils serviront si besoin, lors de la chûte de petits enfants (*), à l'effroi du Tonnerre, à la violence de la Foudre, à la colère des vents et des vagues. Les marins en amènent avec eux et les jettent à la mer quand elle est déchainée. En plus des restes, ils conservent les restes de bougies qui serviront lors des orages. "

(*) Sert à prodiguer des soins. Cf. Rubrique : Rites Croyances et Us / Se soigner

Source : BnF Gallica - Usages et coutumes des Marseillais - F Marchetti - 1683 - Dialogue XI -XIII / XIV XV XIX

PIMPOUNET

Au coin du feu on joue à Pimpounet.

On met les poings fermés les uns sur les autres. Chacun à son tour fait la demande ; chacun, aussi à son tour, doit répondre.

Demande :

Pimpounet ! Pimpounet! Qu'es dedins?

Pimpounet! Pimpounet! Qui est là-dedans?

Réponse :

Buou et vaquo.

Bœuf et vache.

S’il n’y a pas assez de poings entassés les uns sur les autres, on répète Pimpounet! Pimpounet! Siam pas enca au bout. Mounto plus haut. Nous ne sommes pas encore au bout, c’est-à-dire assez élevés. Monte plus haut.

(S’il n’y a pas assez de poings entassés les uns sur les autres, on répète Pimpounet! Pimpounet! Siam pas enca au bout. Mounto plus haut. Nous ne sommes pas encore au bout, c’est-à-dire assez élevés. Monte plus haut.)

Demande :

Qu va gardo ?

Qui garde cela. ?

Réponse :

Pistoulet.

Pistolet.

A quoi le questionneur ajoute : " Aqueou que rira en mounstrant seis dents aura un bouen soufflet." Celui qui rira en montrant les dents aura (recevra) un bon soufflet.

Et le soufflet est donné, par celui qui a fait les demandes, à tous ceux qui ont ri en montrant les dents.

On dit aussi, au coin du feu les gentillesses qui suivent :

Jean eme Jeanno Fasien uno cabano,

Jean faguet un pet,

La cabano s’enveguet.

Jean avec Jeanne Faisaient une cabane,

Jean fit un pet,

La cabane s’écroula.

On dit aussi, en faisant des turlupinades :

Bourguignoun salat,

L’espaso au coustat,

Lou fusiou au cuou,

Garo ! garo ! que ti tuou.

Bourguignon salé, L’épée au côté, Le fusil au derrière, Gare ! gare ! que je te tue.

LES TREIZE DESSERTS

LEI PACHICHOÏ. Les desserts des quatre mendiants : figues, noix, amandes, raisins secs.

Source : Victor Gélu

Figues sèches : Les Franciscains, fondés en 1209

Noix ou noisettes : Les Carmes, fondés en 1206

Amandes : Les Dominicains, fondés en 1215

Raisins secs : Les Augustins, fondés en 1256

LA GLOIRE DE MON PÈRE -M. PAGNOL - FILM D'Y. ROBERT - 1990

SOURCE : ARCHIVE.org - LE MONDE - 17 DÉCEMBRE 1988

LA FÊTE POUR TOUS !

CALÈNOS. Festin. Régal. Présent que l'on fait à l'occasion de la solennité de Noël. Fan calènos : ils sont en festin. N'en fan seis calènos : ils en font leur régal. Pourtu leis calènos : porter les présens de Noël. Faire calènos : Se réunir en famille pour se réjouir et solenniser la veille et les fêtes de la Noël

Source : Google - Revue de Provence - Dic. Provençal / Français - Avril - 1839

" Quand la crèche était achevée, nous attendions avec impatience l'heure du souper. Et pourquoi me direz-vous. Pourquoi ? parce nous faisions bombance, et que tout le monde faisait bombance dans la maison, les gens comme les bêtes. Mon père, ma mère, qui n'auraient jamais mangé une noisette sans la partager avec leur famille, voulaient que chez nous tout fût en fête. Le premier servi, c'était le cheval. On coupait à morceaux un gros pain de ménage dans une terrine, et on l'arrosait d'une dame-jeanne de bon vin. Lorsque le pain avait bien trempé, mon père allait le mettre dans la mangeoire, et le cheval faisait « calèno »."

Source : Google - Revue de Provence - 1899

SOURCE GOOGLE - PASTORALE MAUREL - AIX EN PROVENCE - 1994

LES ETRENNES DE NOËL..

LA POMPE.

Parmi les coutumes sacrées, les Marseillaises s'offrent des étrennes...

Source : BnF Gallica - Usages & coutumes des Marseillais - 1583

Dialogues de Polyhore & Philopatris

SONNER LES CLOCHES

LE SAVIEZ-VOUS ?

" A Château Gombert, près de Marseille, on parlait de " Sonner les Eaux ", pour rappeler aux chrétiens que le Travail de la Maternité de la Vierge commençait "

Claude Seignolle. Le Folklore de la Provence - Paris - Maisonneuve & Larose - 1963 - p217

Nota - En Périgord, on " Sonnait les "O"  pour tripes & boudins ", afin de retrouver le droit de manger de la viande

FOUGOUN

LE SAVIEZ-VOUS ?

FOUGOUN ou FOUGON. Ce mot en Provençal (Marseillais), ou repris de manière générale, désignait un petit four domestique réalisé de manière sommaire, pour y cuire des aliments sans excés de produit de chauffe.

Il était isolé dans la cuisine, ou au plus près de la cheminée ; parfois même, à l'intérieur...

Ce mot est utilisé dans la marine du XVIème siècle, pour désigner à Marseille, le réduit façonné en bois et argile, qui servait de cuisine, construit à bord des galères. Il occupait un rang de rames, et de ce fait neutralisait le coté opposé qui de fait, n'en comportait rarement plus..... Il était alimenté par du charbon stocké dans une petite soute situé à l'avant de la proue (le gavon)

Les produits "cuisinés" chauds servaient à la chiourme. La "viande" était achetée sur la Place du Cul de Boeuf situé au bas de la Canebière (actuelle), sur le Port, pour servir aux bagnards (condamnés de Droit commun), et esclaves (Musulmans et Turcs).

" Cul de (du) Boeuf " : Littéralement, tout ce qui reste incommestible de l'animal. Les invendus des boucheries...., les tripes. La "vraie", était réservée à l'hôpital des malades de la chiourme (250 g de mouton par jour)

On notera dans le document joint en annexe, une confusion. Le Fogoun y est désigné comme étant le foyer (l'âtre) de la maison Provençale....

On notera par ailleurs, que le mot " Noël " a remplacé celui d'origine : "Cacho-Fuech"...

Sources : BnF - Les galères de France - P Masson -1938 - Dictionnaires Provençaux

SOURCE : ROUNDELET FÉLIBREN

SOURCES : HONNORAT - ACHARD - LACOMBE - MISTRAL...